Aide-mémoire n°97

Dans le pays des sept collines, il y a un roi craint de tous et sa « fille », Judith la Triste. Comme elle s’ennuie, il fait enlever des petites filles pour lui tenir compagnie. Rien ne va jusqu’à l’apparition d’Anna qui chante, une fille franche et à la voix d’ange. Grâce à elle, Judith et tous les autres habitants du pays se soulèvent et arrivent à chasser le roi, qui ne fait plus peur à personne.

Un conte haut en couleurs, avec de belles illustrations, qui plaira aux petits comme aux grands !

Inspiré des rencontres de l’autrice, ce roman graphique raconte la vie de deux femmes. Mona, Syrienne, a fui son pays avec son mari pour Athènes, vit dans un camp de réfugiés et est enceinte. Monika, est dans un mariage malheureux et sage-femme à Médecins du Monde. Elle s’occupe de la grossesse de Mona. Deux femmes que tout semble opposer. Pourtant, leurs chemins se croisent et elles deviennent amies.

À travers leur récit, c’est l’histoire de la crise athénienne et de l’immigration en Syrie qui est dépeinte. Une BD pleine d’humanité et d’une grande qualité graphique.

Plusieurs fois dans sa vie, Ismaël a vécu des faits de racisme. En 2017, la visite de l’exposition « Nous et les autres : des préjugés au racisme » au Musée de l’Homme à Paris lui fait l’effet d’un électrochoc ! Enthousiasmé par son propos, il invite les deux commissaires – une anthropologue généticienne et une historienne – à coréaliser une BD. Voici le résultat de ce travail : un récit dans lequel l’auteur se met en scène et mêle sa quête personnelle à un échange avec les deux scientifiques. Un habile mélange de « savoirs chauds » et « froids » à même de toucher les consciences, porté par une narration dynamique et un graphisme coloré !

Un choix de textes fait par Marin Schaffner, pour lutter contre toutes les dominations et toutes les hiérarchisations. Que le « destin » de l’humanité – le pouvoir absolu de l’humain sur le vivant – soit remis enfin en question est une avancée majeure réconfortante pour le futur. Si on ne peut détruire une domination, quelle qu’elle soit sans éradiquer les hiérarchies, il en est de même pour les problèmes écologiques qui ne seront résolus sans un changement social profond, c’est l’écologie sociale. Murray Bookchin promeut une société écologique qui ne sera ni de « l’écologie profonde » qui mythifie la nature et tend vers le fascisme, ni une « écolo-technocratie », laissant tout pouvoir aux scientifiques pour gérer les crises. « Parvenir à notre pleine humanité est un problème social, qui dépend de changements institutionnels et culturels fondamentaux : ne pas le voir, c’est réduire l’écologie à la zoologie et faire de toute tentative de réaliser une société écologique une chimère. »

On la cherche, elle nous passe à côté… On la trouve… Mais qu’est-ce que cette gigantesque petite chose ? Cet album, aux illustrations d’une grande poésie, vous transportera.

La princesse Castille de Bonaloi est la fille du roi, mais ce n’est pas pour ça qu’elle se comporte comme telle ! Elle aime aller à la ferme et aider son ami Armand, se rouler dans la boue et péter. Elle veut aussi décider pour elle-même : pas question de se coltiner un prince de pacotille, prétentieux et méprisant. Elle décidera elle-même de qui elle sera aimée et qui elle aimera !

Un petit livre qui évoque la liberté d’être qui on est et qui on veut être, accessible dès 3 ans.

Le terme « néolibéralisme » résonne sans cesse dans les discours politiques. Pourtant, ce concept renvoie à une réalité difficile à définir… Depuis les années 1980, le recul temporel a permis à de nombreuses études de circonscrire davantage cet objet politique. C’est en s’appuyant sur ce socle de connaissances ainsi que sur son corpus idéologique propre, que les auteurs livrent ici une analyse du néolibéralisme sur le temps long. En ouvrant cette perspective, ils nous montrent que cette doctrine a d’emblée fait le choix de la guerre de domination, de la violence en vue de réaliser le projet d’une pure société de marché. Toutefois, et là est sa force, cette stratégie a évolué au gré du temps et des circonstances, recourant à des moyens divers allant de la répression armée à l’usage du droit, dans et par les institutions étatiques. Une dangereuse plasticité portée par la même logique dogmatique ! Dans le fond, Thatcher, Pinochet, Trump, Bolsonaro, Macron, même combat !

Après Les crocodiles, le bédéiste Thomas Mathieu revient en force ! Cette bande dessinée-essai documentaire tente ici une explication sur le genre et la théorie du genre (parce qu’il y a une différence), mais aussi sur les réfractaires, leurs arguments et sur tous les aspects politiques autour de celui-ci. Une lecture complète et instructive

Hage, « avec son talent pour mettre en lien des éléments apparemment disparates, fait apparaître ce que nous ne voyons pas » avance Françoise Vergès. L’anthropologue libano-australien y parviendrait une nouvelle fois dans le présent essai en illustrant les connexions internes entre le racisme et le spécisme contemporains. Dans un monde régi par la domestication, le loup et le Musulman s’apparentent à deux grandes figures fantasmatiques menaçant la civilisation. à rebours de la déconstruction théorique pure des discours racistes, l’auteur mobilise cette métaphore animale car elle dit autre chose de ses émetteurs, tout en permettant de décortiquer leurs manières d’agir au quotidien dans un environnement précis. Ce qui d’après Hage permet in fine de penser les structures sociales de base engendrant racisme ET crise environnementale. CQFD ?

« On vous suit. On vous met dans des cases. On vous vend. On se sert de vous. » Jan Walraven, journaliste d’investigation flamand, nous plonge dans une enquête sur le monde « impalpable » des algorithmes et du Big Data. On y (re)découvre comment les GAFAM récoltent nos données personnelles et les utilisent pour influencer nos manières d’agir, d’acheter… et même de voter. Face au miroir aux alouettes brandit par les géants du « dématérialisé », nous acceptons de sacrifier notre vie privée et notre liberté de choix. Au-delà de ce constat « de vol », l’auteur délivre un message encourageant et montre que des alternatives existent pour reconquérir – maintenant et pour le futur – notre vie privée et notre indépendance sur les supports numériques. Un propos qui a fait mouche auprès du jury de la Foire du livre politique de Liège 2020, qui a décidé de consacrer le travail de Walraven.

Ce tout petit livre (13,5 cm de haut !) est une défense de l’intersectionnalité et de sa place dans les sciences sociales. Il explore et donne une synthèse du concept qui permet une analyse plus complète de nos sociétés et des oppressions dans celles-ci (capitalisme, sexisme, racisme, homophobie… et bien d’autres malheureusement) qui sont liées et se renforcent les unes les autres.

La mort de George Floyd a suscité une vague d’indignation de par le monde. Mais pas toujours celle à laquelle l’on pense. En effet, une nébuleuse d’auteurs néoconservateurs francophones ont exploité ce drame et ses retombées médiatiques pour polémiquer autour de leurs cibles habituelles : le politiquement correct, le multiculturalisme, « l’obsession égalitaire », les gauchistes, etc. Pire, nombre d’entre eux « ont pris des libertés inadmissibles avec les faits historiques qu’ils ont transformés en armes de guerre culturelle, afin de servir leurs convictions politiques ». Avec cet ouvrage qui se situe entre l’essai et la lettre, Le Glaunec tente de répondre à l’un d’eux : Christian Roux, écrivain, chroniqueur ; un de ces anciens intellectuels « progressistes » qui a abandonné l’empathie envers les victimes et la lutte contre la « haine de l’autre » pour embrasser la thèse de la « haine de soi » chère à l’extrême droite …

Ce « journal comme pour les grands, en plus marrant » se penche sur le « rien ne va, ras-le-bol, y’en a marre, faut que ça change ». Des planches de bd, des textes, des jeux, une marre-nifestation, de la science (« y’en a mare ») et encore plein d’autres trucs pour expliquer, comprendre, analyser et agir quand on en a marre.